Je crois que chez certains êtres, chez ceux qui se consument, qui sont « fils de la cendre et de la lumière », quelque chose se forme, se coagule. Une « pierre » (alchimique) se forme dans leur cœur. On peut l’appeler : la miséricorde, l’amour, qui résiste aux émotions diverses qui affluent de toutes les demandes de la psyché, des frustrations conscientes ou inconscientes. Ces frustrations viennent de très, très loin, d’au-delà de ma vie, mais aussi de ma vie propre. C’est ce que je n’ai pas voulu voir, ce que je n’ai pas voulu entériner. Il y a une stratégie qu’il faut respecter dans sa vie privée, dans sa vie intime, c’est celle du ferment. Le ferment est une force qui a besoin d’un terrain, d’une substance, d’une matière qui l’accueille, mais qui en même temps lui résiste, sinon il n’y a pas l’opération de coagulation. Donc, en vous-même il doit y avoir ce qui résiste, – que vous devez voir et accepter comme résistance –, mais également ce qui demande accueil.
Mounir Hafez – 10 janvier 1990